Aucune idée de ce que je fais ici
Alors, petit récapitulatif depuis mon dernier écrit…
J’ai passé des jours à entendre les gens "proches" de moi me dire des choses comme "après ça, tu verras, tu auras plein d’énergie, plein de projets, tu seras guérie", avant d’enfin pouvoir les quitter et commencer mon sevrage. Pourquoi ils ont eu besoin de me dire ces trucs-là ? Je pense que c’était surtout pour se rassurer, eux. Parce que moi, à part me foutre la pression, me gêner, et me mettre hyper mal à l’aise, ça m’aidait pas du tout.
Bref, donc j’ai atterri à l’hosto. Et c’était bien plus sympa que ce à quoi je m’attendais. Le personnel au petits soins, les autres patients plutôt sympas, les repas agréables, et mes nuits un peu moins agitées qu’avant grâce au valium. Ah, et bien sûr, M est venue me rendre une petite visite, pendant cette semaine-là. On a parlé pendant plus d’une heure, je l’ai emmenée dans le coin super que j’avais découvert, en haut des jardins, où on peut avoir une magnifique vue sur les environs. Ce moment restera gravé dans ma mémoire, c’est une certitude.
Et désormais, l’étape suivante : me voici en centre de cure. Pardon de post-cure, comme on appelle ça, parce que c’est ce qu’on fait après un sevrage. Alors, l’endroit en lui-même n’est pas horrible. Disons que c’est plutôt l’ambiance que je n’arrive pas à apprécier… Je m’explique. Dès mon arrivée, j’ai eu ce sentiment, cette impression bizarre, et cette pensée : "je ne suis pas à ma place ici." Ce genre d’intuition, chez moi, c’est généralement à prendre au sérieux. Mais bon, je me suis dit que je pensais ça parce que c’était le premier jour.
On est au cinquième jour, maintenant. Et je ne me suis toujours pas habituée. Je n’aime pas les faux sourires qu’on me fait, et je n’aime pas cette impression que moi aussi je dois en faire. Je déteste le fait de ne jamais pouvoir être seule, tranquille, sans bruit ou personne pour me déranger. Même ma chambre n’est pas un lieu où je me sens bien, parce qu’il faut savoir qu’ici on entend tout ; les gens dans le couloir, les autres dans les chambres voisines s’ils parlent un peu trop fort… En gros, ça me fait péter un câble.
Aujourd’hui, je me suis carrément réveillée avec les nerfs à vif, énervée. J’écoute des chansons de rock et de métal depuis 8 heures du matin, depuis que je n’ai pas réussi à me rendormir après le réveil de 7 heures (oui, oui, ici c’est réveil à 7 heures obligatoire). Rien ne m’apaise. Pas même de mettre tout ça par écrit.
Mais qu’est-ce que je fais ici ? Je veux dire, ça fait maintenant 12 jours que j’ai rien bu du tout. Et je ne ressens aucun manque. Non, à la place, j’ai envie de frapper dans le sac installé exprès dans la salle de repos (pourquoi là-bas, franchement, alors que les gens veulent se poser devant la télé ?? ? Encore une super idée de génie...), pour éviter de finir par frapper quelqu’un. Pourquoi je dis que j’ai envie de frapper quelqu’un ? Oh, mais parce qu’ici, les gens font l’autruche sur l’addiction. Enfin, les autres résidents/malades. Bien entendu, on peut parler de ça avec les médecins, les infirmières, et autres. Mais entre addicts, on dirait qu’ils se sont tous fait passer le mot, et qu’on peut rien dire. Le truc, c’est que moi j’ai besoin de rendre les choses moins dramatiques, de blaguer sur le problème pour ne pas stresser. D’ailleurs, à l’hosto, on le faisait souvent, avec les patients que je croisais. Ici, pas moyen ; ils changent de sujet à chaque fois. Et puis toutes ces phrases affichées aux murs, ces machins supposés nous aider à voir les choses de façon "positive"... ça me rappelle ma mère qui me disait que mon problème, c’était que j’interprétais mal les événements, alors que si je "souriais à la vie" tout irait bien. Elle m’avait dit ça alors que j’étais en pleine dépression, clouée à mon lit avec des pensées suicidaires plein la tête. Great job, Mum. Enfin, on peut pas lui reprocher trop non plus ; c’est pas évident de savoir réagir bien face à ce genre de problèmes.
On le sent, hein, que je suis encore énervée, là. Surtout en plein doute… J’ai presque envie d’appeler M et de lui dire que je vais me barrer d’ici.